Le Menu #51 : midi, minuit et bouillon de onze heures

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Bonjour,

Dimanche midi alors que je déjeunais, je me suis posé la question du sens des mots midi et minuit. Pour vérifier tout cela, rien de mieux que de se plonger dans un dictionnaire et plus précisément dans le tome 11 du Dictionnaire universel de Pierre Larousse paru entre 1866 et 1877. On y apprend que le mot midi désigne le milieu du jour. (Du latin dies, jour) et que le mot minuit signifie milieu de la nuit, heure aussi éloignée du coucher que du lever du soleil.

En astronomie, on parle du Minuit vrai : moment ou le centre du soleil passe au méridien opposé au méridien du lieu. Une petite remarque de Monsieur Larousse nous précise que mot minuit serait logiquement féminin et a été autrefois de ce genre ; le masculin est aujourd’hui consacré par l’usage.

Si de nos jours, le midi continue de marquer le milieu de la journée marqué par un repas que l’on nomme déjeuner – sachant qu’historiquement le déjeuner désignait le repas du matin, celui de midi s’appelant le dîner et celui du soir le souper – il nous paraît plus curieux que minuit marque le milieu de la nuit si l’on a par exemple pour habitude de se coucher vers 22h00 (soit 2 heures avant) et de se lever à 7h00 (soit vous savez combien de temps après).

Je dois avouer que ce minuit, pas vraiment au milieu de ma nuit, m’a un peu tracassé. Et j’ai donc voulu vérifier si le mot désignait véritablement ce qu’il était sachant que les jours rallongent depuis Noël.

J’ai donc cherché les heures de lever et de coucher du soleil du mois de février et mis tout cela dans un fichier Excel pour calculer à quelle heure tombait le milieu de la nuit et si cette heure était toujours la même. Je sais, cela peut paraître bizarre de passer un peu de temps à calculer ce genre de choses mais bon, je voulais en avoir le cœur net.

Donc, le 1er février le soleil s’est levé à 8h20 à Paris (je n’habite pas à Paris mais il fallait prendre une base) et s’est couché à 17h48 soit 6 heures et 12 minutes avant minuit. Le milieu de la nuit a donc eu lieu à 1h04 précisément. J’ai fait le même calcul pour les jours suivants (pas tous, rassurez-vous) et à chaque fois, le milieu de la nuit tombe à 1h04 à quelques secondes près.

Cette écart peut sembler étrange mais l’explication est simple. Lorsqu’il est 1h04 à Paris, il est 0h04 à Londres et à Greenwich où se trouve le méridien où la longitude est définie comme égale à 0°. Il faut savoir que depuis 1940 (et l’invasion allemande), Paris est à l’heure de Berlin alors que son fuseau horaire correspond à celui de Greenwich…

En conclusion minuit désigne bien le milieu de la nuit. Nous voilà rassurés. 😉

On mange rarement à minuit et en ce qui concerne le fameux bouillon de onze heures, je ne peux que vous le déconseiller car l’expression désigne un poison.

Une recette

Les 3 recettes sont extraites des Plaisirs de la table d’Édouard Nignon paru en 1926. Il y est bien sûr question de bouillon.

Le grand bouillon
Le grand bouillon ou bouillon blanc est déjà un excellent potage, simple et substantiel. Mais on l’emploie surtout dans la préparation des potages supérieurs. Les gastronomes savent en effet qu’en bonne cuisine, les potages ne sont jamais préparés à l’eau, si ce n’est pour des malades ou des convalescents. Pour obtenir 10 litres de ce bouillon, versez dans une marmite 15 litres d’eau froide ; mettez ensuite 4 kg 500 de jarret de bœuf et 4 kg de culotte bien maigre. Ajoutez 6 belles carottes rouges taillées, 5 beaux navets, 400 grammes de blanc de poireaux, 2 panais, un gros oignon piqué de 4 clous de girofle, 2 belles gousses d’ail, un paquet d’environ 150 grammes de branches de céleri. Quand ce mélange sera arrivé à l’ébullition, vous le ferez cuire sur un feu plus lent pendant six heures, puis le verserez à travers une serviette dans un pot en grès.

Petit bouillon
Hachez finement 600 grammes de bœuf bien maigre, placez-le dans une casserole, mélangez-lui un litre d’eau froide, une carotte, un blanc de poireau, le tout émincé finement et 30 grammes de céleri. Portez à ébullition, un grain de sel, remuez jusqu’à ce qu’il ne bout puis cuisez-le lentement jusqu’à la moitié de réduction, vous obtiendrez de cette façon, en peu de temps, 2 tasses d’excellent bouillon.

Bouillon d’une heure
Quelquefois on peut avoir besoin d’une tasse de bouillon au plus tôt et pour ne pas avoir recours à des produits incertains voici ce que je préconise : hachez 1 livre de maigre de bœuf dénervé, placez-le dans une casserole, joignez-y le rouge d’une carotte et le blanc d’un poireau, une brindille de céleri, le tout émincé, une pincée de sel et remuez bien le tout avec un litre d’eau froide, portez à ébullition sans le quitter. Cuisez-le lentement, quand le liquide est réduit de moitié passez-le à la mousseline et versez quelques gouttes d’un fin caramel pour lui donner les signes d’un blond pièce d’or.

Un exquis mot

La définition de cette semaine est extraite du Dictionnaire universel de Pierre Larousse paru entre 1866 et 1877.

Quart bouillon
subst. masc.
~
Sel que l’on obtenait, en Normandie , en faisant bouillir dans l’eau des sables du rivage, et dont un quart était prélevé pour les greniers du roi.

Des nouvelles des petits fretins

Le sixième numéro d’Agueusie est en route pour vos boîtes à lettres où vous devriez bientôt pouvoir le découvrir. Je vous en souhaite une bonne lecture.

Si vous n’avez pas envie de lire, vous pouvez tranquillement écouter un ou plusieurs épisodes de Radio Cuisine – podcast qui donne à réentendre les chroniques radiophoniques qu’Édouard de Pomiane présentait sur Radio Paris entre 1923 et 1929. Il y sera question de croûtes et tranches au fromage demain, et de sauce hollandaise vendredi prochain.

Jeudi prochain paraît dans la collection manger-penser La cuisine romanesca, un fort intéressant essai de David Soldini sur la cuisine de la ville éternelle. Sachant que les 100 premiers exemplaires de cette édition sont numérotés et signés par l’auteur, si j’étais vous, je n’attendrais pas une éternité avant d’aller voir de quoi il retourne…

Pour finir, une petite citation du poète Georges Clémenceau (1841-1929) qui n’a pas de rapport avec la phrase qui précède (puisqu’elle est vraie) mais qui peut être utile en cette période de fin de chasse, de menace de guerre et d’élection à venir :

“On ne ment jamais tant qu’avant les élections,
pendant la guerre et après la chasse.”

Voilà, c’est tout pour aujourd’hui.

À la revoyure !

Laurent, poisson de Méditerranée chez Menu Fretin

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